Salut V/ !
Je pense à toi qui décompresse de tes deux mois d’activité frénétique, et je me dis que si c’est comme les paliers de décompression en plongée tu n’en auras pas qu’un, alors j’espère que tu auras le temps de revenir à la surface avant de replonger ! Prends ton mal en patience, ou en machine à coudre.
J’ai parlé lors du boot camp d’écriture (où tu n’étais pas snif) de pourquoi je voulais écrire, et la réponse qui m’est venue est : j’ai l’impression d’aider des gens dans la vie en leur livrant des bouts d’expérience personnelle qui raisonnent pour eux et provoquent des déclics, l’écrire permettrait de le faire de façon plus large et asynchrone. Et j’ai parlé du fait que j’appelais cela des “échanges d’otages”. En fait c’est un terme qu’avait inventé mon amie Clémence lorsque nous partagions énormément nos expériences entre nous, et avec d’autres qui ne nous connaissaient pas forcément. Et comme c’est un peu ce que fait notre blog aussi je me suis demandée comment qualifier cela.
J’ai comparé aux approches d’aide et accompagnement formelles, pour voir appliqué à la vie quotidienne et à la relation non thérapeutique/non professionnelle en quoi ces échanges d’otages avaient une vraie valeur et une vraie originalité.
– L’approche très neutre : le coach au sens puriste extrême du terme. Il ne devrait que questionner habilement pour faire émerger, et surtout pas amener des choses personnelles ou orientées dans l’affaire. Il parle donc pas ou peu de lui, son ressenti, son expérience. Tout au plus il fait des propositions, ou apporte des méthodes. Dans la vraie vie : tu sais, ces potes qui te procurent un bien être fou, t’écoutent mieux que tous les autres, mais au final tu as l’impression d’atteindre un plafond de verre sur le partage profond car ils ne livrent rien de personnel ? Voilà la limite.
– L’approche “sachante” : le psy qui se prononce et décrypte selon ses modèles, il est tout sauf neutre mais il l’est avec un référentiel théorique. Sa personne fait partie du processus thérapeutique mais sa personnalité authentique et son vécu ne sont pas partagés. Il est plus un expert conscient de sa non neutralité qu’une personne pendant la séance. Il sait où il veut en venir. Dans la vraie vie : parfois c’est éclairant, mais très jugeant et posture haute donc peut braquer. Et puis qui peut se poser en expert des expériences personnelles…?
– L’approche “expérientielle” : en toute conscience et avec protection et lucidité, le thérapeute utilise sa présence, expérience, sa personne authentique pour raisonner pendant le processus. Il part du patient et de ce qu’il vit/dit, et doit être extrêmement connecté à cela et à ce qui raisonne en lui en même temps. Cela provoque une grande proximité, ouverture, et un vrai shift au sens expérience du terme et pas intellectuel. Dans la vraie vie : avec des gens très proches mille fois oui mais ils ne sont pas légion, car c’est profond et ça peut parfois être trop bougeant ou paraître un peu ésotérique à certains. Donc très limité au quotidien.
Dans l’échange d’otage, on livre une histoire, une expérience personnelle vécue (donc on sort de la neutralité), sans la décréter vérité unique (on n’est expert que de sa propre histoire, on sort du jugement sur celle de l’autre). On n’est pas dans l’expérientiel mais on est dans l’authenticité et l’incarnation. On est dans la confiance puisqu’on “libère l’otage” (une part de soi) avant l’autre, sans forcer l’autre à s’ouvrir. On laisse du coup la possibilité d’exprimer un vécu qui raisonne mais qui n’est pas identique. On part du personnel pour toucher à l’universel et revenir au personnel. Et c’est très humble, très petit, et beaucoup moins intrusif que des questions.
C’est comme ça que j’ai découvert que parler de soi n’était pas que synonyme d’égocentrisme. Et que l’on peut questionner et écouter sans générosité. Et que l’on peut faire du profond avec du petit.
J’en profite donc pour te remercier pour nos échanges d’otages car nous soufflons avec ce bonbon nos 25 premières bougies !
Bises.
F/.