S’arrêter et savourer

Salut F/,


Je te sais sur les routes au bord de la Loire, pédalant vers l’océan. J’espère que tu profites à fond de ce voyage, tant attendu et mérité, et que vous faites de belles découvertes en chemin!


Pour ma part, je fais un bref arrêt chez moi entre deux sessions de vacances, et ça va bien. Ca va même merveilleusement bien. Si bien que j’avais envie de partager ça avec toi. Je vis un moment où tout est à sa juste place, où je suis dans le bon rythme, entourée des bonnes personnes, dans un équilibre presque parfait. Et je trouve ça incroyable de vivre cet état-là, de le rencontrer de plus en plus souvent, de goûter à cette plénitude qui donne envie d’exploser de joie tellement c’est bon!
Tu me confiais un jour dans un message vocal que tout ce travail que tu avais fait sur toi ces dernières années, il t’aidait à identifier les moments où tu n’étais pas mal, et à les goûter avec plaisir. Et que c’était déjà tellement énorme que tout ce travail en valait la peine. Pour ma part, je me rends compte que tout ce travail me permet de sublimer les moments où ça va bien. De mettre en lumière qu’il y en a plein, des moments comme ça, et que toutes ces années, je les ai considérés comme acquis, sans même vraiment m’en rendre compte. Qu’aller bien, c’était normal, et que donc ça n’avait pas tant de valeur que ça.

Alors voilà, aujourd’hui je prends la décision de régulièrement m’arrêter, et de les savourer, ces moments. De me laisser emplir de cette joie profonde d’être là où je suis, comme je suis, en pleine possession de mes moyens, et si bien entourée. Ca fait un bien fou.


Je t’embrasse fort et espère manger une glace sur la plage avec toi demain! V/

Soutenir le vide

Re-bonjour V/ !

Après une période de production de bonbons un peu laborieuse de ma part, je prend de l’avance cette fois ! Merci à toi d’avoir soutenu le rythme ces dernières semaines et d’avoir, avec une main de fer dans un gant de velours, permis que nous continuions nos échanges qui me sont chers autant qu’à toi !

J’ai partagé et diffusé récemment avec toi et deux autres amies proches une phrase. Elle me vient d’une femme qui m’a beaucoup aidée et inspirée, et j’ai envie d’y revenir ici. Dans une période assez difficile pour moi il y a longtemps, elle m’a dit :

“Avant de chercher à l’extérieur comment combler ou remplir, il faut d’abord apprendre à soutenir ce vide”

Itaka

Je n’ai pas compris tout de suite, et puis c’est devenu un sésame pour moi, que je ressasse comme un mantra depuis lors, pour qu’il diffuse à tous vents.

Le vide, c’est celui que l’on ressent quand il y a trop d’espace, trop de possibles. Parce que l’on n’a rien prévu comme activité, qu’il n’y a pas de contraintes et que le temps est ouvert, béant devant nous. On en rêve souvent et finalement quand cela se présente il y a un moment d’hébétude, un réflexe de “je fais quoi maintenant tout de suite ?”.

Un autre vide, c’est celui laissé par l’absence, d’un être cher ou d’un compagnon de route, ou plus simplement de ceux qui partagent habituellement notre vie quotidienne. Ou simplement celui d’un week-end ou d’une soirée sans contacts avec le monde extérieur.

Et puis il y a le vide de sens, que certains ne connaissent pas, que j’ai découvert assez tard pour me souvenir comment c’était avant (avant j’avais un mécanisme dans la tête qui ne s’enrayait jamais, je trouvais que les gens se posaient des questions compliquées, et j’étais bonne en Maths). Je l’appelle maintenant faille ou vide existentiel(le). Il nous rattrape parfois alors même que l’on est dans une soirée entourée de beaucoup de gens, qui ne voient pas le trou à l’intérieur de toi.

Bref, tu vois de quoi je parle puisqu’il t’a visitée récemment, ce vide dans sa version positive du “champ des possibles”.

Soutenir ce vide, ça veut dire résister à la tentation de ne pas le regarder, de l’éviter, de le combler. Au moins un peu. Commencer par ne pas agir (c’est pas instinctif), le ressentir (c’est pas drôle), le contempler (ça peut angoisser, ça peut faire mal) et puis rester avec (c’est assez étrange au début). Et puis là, une détente se crée, une urgence disparait, une angoisse s’apaise. On peut se demander “de quoi on a besoin” et pas “ce qu’on va faire”. Si l’on arrive à faire ça, petit à petit, la peur du vide disparait, on ne tombe pas dans le vide, et le vide aussi finit par se dissoudre. C’est ce qu’on appelle le vide fertile !

(Si, je te jure, le vide ça se dissout. Si si.)

(Non, je ne vais pas te mentir, je n’y arrive pas à chaque fois. Non non.)

Mais ça m’a changé la vie!

Grosses bises!

F/.