Un non pour un oui

Bonsoir F/,

C’est dans la fraîcheur du soir que je t’écris – la journée a été chaude, puis le vent s’est levé, et la petite brise qui souffle à présent me donnerait presque des frissons… Ça fait du bien.

Il aura fallu attendre ce jeudi soir pour trouver l’inspiration pour le bonbon de la semaine. Beaucoup de sujets qui ont occupé mon esprit, et puis aussi la puissance, presque intimidante, de nos deux derniers échanges qui m’ont fait me demander : que vais-je pouvoir amener comme sujet qui sera à la hauteur?

Et puis, à la hauteur ou pas, le sujet est arrivé tout seul, ce midi, dans la bouche d’une personne dont je viens de faire la connaissance dans le cadre de mes rencontres professionnelles, et qui me disait que lors des séances de coaching qu’elle faisait vivre à ses clients, il y avait une question qu’elle aimait tout particulièrement poser :

“Quand tu dis non à quelque chose ou à quelqu’un, à quelle partie de toi dis-tu véritablement oui?”

J’adore cette phrase, tout d’abord parce qu’elle est tournée de façon tellement plus positive que celle que j’avais entendue il y quelques années (“quand tu dis oui à quelqu’un, assure-toi que tu ne dises pas non à une partie de toi-même”), qu’elle ouvre un champ de réflexion passionnant, et aussi et surtout parce que, d’une certaine manière, elle résonne très fort par rapport aux sujets qui me préoccupent en ce moment!

Est-ce la société qui fait de nous, les femmes, des êtres dont on attend qu’ils répondent avant tout aux besoins des autres? Ou est-ce le syndrome de la bonne élève, qui ne veut pas décevoir et préfère se plier aux désirs de l’autre pour “faire plaisir”? Dans tous les cas, que de paradoxes dans cette phrase… et que de possibilités aussi! Tout cet espace qu’ouvre le “non”, son pouvoir libérateur que j’expérimente sur des sujets de plus en plus fondamentaux pour aller vers moi-même et ces aspects de moi qui me sont encore inconnus, ces nouvelles possibilités qui font peur mais qui, aussi, font vibrer très fort des choses qui me reconnectent à qui je suis et à ma fameuse “singularité”… Que de puissance dans ce mot! Et que me réserve-t-il encore?

Merci encore pour ton petit paquet qui, dans tout ce qu’il contient, me donne beaucoup de force pour continuer à m’engager sur mon chemin.

Je t’embrasse,

V/.

Le courage d’abandonner

Salut F/ !

Je déroge pour une fois à la règle selon laquelle nous ne gardons pour nos bonbons que des sujets qui n’ont pas été abordés (voire surabordés!) dans nos échanges WhatsApp… et pourtant, celui-ci me semble tellement fondamental qu’un bonbon sur ce thème a complètement sa place sur l’Upside Down.
Plongée dans la grande marmite de l’entrepreneuriat depuis bientôt un an, je suis régulièrement mise face à ces grandes questions (pour moi-même, et bien sûr aussi pour les personnes que je rencontre et que j’accompagne) : jusqu’où faut-il aller dans un projet? Est-ce que c’est le bon moment d’arrêter ? A partir de quand le fait de continuer risque de me faire plus de mal que de bien ? est-ce qu’arrêter aujourd’hui n’est pas une forme de refus d’affronter des choses qui me font peur ?

Si l’on réfléchit bien, cette question se pose aussi dans des champs bien plus vastes que celui de l’entrepreneuriat. Dans tout job, salarié ou non, dans des relations amoureuses, dans un projet de déménagement ou de départ en voyage, bref… dans tous les grands domaines de la vie (sauf peut-être celui d’avoir des enfants, où l’abandon prend une tournure très différente 🙂).
Et puis, d’un autre côté, il est communément admis que “le bonheur est le chemin”, que “les expériences nous façonnent et font de nous ce que nous sommes aujourd’hui”, “qu’on ne revient jamais en arrière en réorientant son projet”. Je partage très largement ces principes, et fais moi aussi tous les jours l’expérience qu’on ne recommence jamais les choses à zéro.

Mais alors, finalement, qu’a-t-on peur d’abandonner en arrêtant un projet, une relation?

J’ai longtemps cru que ce qui était dur, c’était de lâcher le projet lui-même, que c’était frustrant de ne pas aller “au bout” (quel bout d’ailleurs?).

Je me dis aujourd’hui que peut-être, ce qui est encore plus dur que cela, c’est de lâcher une forme de stabilité, l’idée que “ca y est, j’ai trouvé mon truc dans la vie”, un équilibre après des jours ou des années de réflexions. De se dire que la recherche continue, en prenant une forme nouvelle qui reste à découvrir, qu’on se relance dans l’inconnu. Personnellement, je commence à toucher du doigt que finalement, c’est bien cette recherche qui me fait vibrer, le frisson d’oser faire des choses différentes, d’aller vers des personnes inconnues, de changer de cadre.

Je te souhaite un bon dimanche et m’en vais crémer mes petits coups de soleil suite à ma session “plage” d’hier!

bises et à bientôt,

V/.

Le droit de mal écouter

Salut F/ !

Je t’écris en ce lundi matin, te sachant sous la canicule parisienne alors qu’ici, il fait frais et il pleut… Deux villes, deux ambiances ! Je t’enverrais bien un peu de fraîcheur pour te soulager, et si tu pouvais m’envoyer un peu de soleil, je ne dirais pas non 🙂

En cette journée morose (au moins nos WhatsApp du matin nous ont appris que nous partagions cela aujourd’hui), je voulais revenir sur ce thème qui m’est cher : celui de l’écoute. Je t’avais dit il y quelques semaines dans un message vocal que je me posais une question fondamentale : “pourquoi était-ce communément admis que cela ne se faisait pas de “mal parler” à quelqu’un, mais qu’il était visiblement bien moins grave de “mal écouter”? “. En effet, il me semblait que jusque-là dans ma vie, j’avais été plusieurs fois témoin de situations où j’entendais “tu ne me parles pas comme ça !” (qu’il s’agisse d’enfants ou d’adultes d’ailleurs) ou “et là, il m’a mal parlé, ça m’a énervé!”. En revanche, beaucoup moins de phrases liées à l’écoute, ou tout du moins exprimées ouvertement dans l’espace public.
Depuis, cette question a fait son chemin, et je la partage avec certains de mes interlocuteurs, quand cela se présente. Je te fais part aujourd’hui d’une réflexion intéressante qu’a faite l’une de mes amies coach : selon elle, il n’est possible de bien écouter l’autre que lorsqu’on est en mesure de bien s’écouter soi. Cette idée m’a fait penser à une citation du Dalaï Lama qui m’avait, elle aussi, bien fait réfléchir à sa lecture : ” Quand tu parles, tu ne fais que répéter ce que tu sais. Mais quand tu écoutes, tu peux apprendre quelque chose de nouveau.

A l’époque, je m’étais dit qu’effectivement, se taire et écouter permettait de découvrir quelque chose de nouveau sur l’autre ou de l’autre. Je prends maintenant conscience qu’écouter l’autre permet aussi et avant tout d’apprendre des choses sur soi, en prêtant attention à ses propres ressentis, les idées qui traversent l’esprit en entendant telle ou telle histoire, les jugements qui surgissent, les convictions que viennent chatouiller les paroles prononcées.

Dans une société où il est valorisé de s’exprimer (en public, sur les réseaux sociaux, …), et pour moi qui, comme je le disais dans un bonbon précédent, suis plutôt à l’aise dans ce monde de l’oral, je trouve réconfortant de se dire qu’il y en a un autre, complémentaire et qui permet de passer de “l’autre côté”, de plonger au fond de soi, tout aussi riche que le premier.

Une forme de développement personnel gratuite et sans limite, en somme! Que c’est bon de se dire que nous apprenons tout au long de notre vie.

Je t’embrasse et te souhaite une bonne journée malgré la canicule et les petits tracas du quotidien.

V/

Mauvaise mère ?

Bonsoir F/, J’espère que tu vas bien ce soir, et que tu as retrouvé la sérénité que tu espérais auprès de ton homme… Qu’elles sont difficiles, ces périodes où on passe notre temps à serrer les dents au boulot en attendant des jours meilleurs, alors que nous avons entre temps tant d’outils et de bonnes pratiques entre les mains pour prendre du recul et garder la tête froide!
En parlant de tête froide, j’ai envie de parler ce soir d’un sujet que j’ai déjà maintes fois abordé dans nos échanges vocaux mais qui, encore et toujours, m’énerve au plus haut point. En “scrollant” sur mon téléphone à lire des articles sur les réseaux sociaux, je tombe sur un exemple parfait de ce qui me fait bondir. Je te fais part du début (pas besoin d’aller beaucoup plus loin pour comprendre la teneur de cet article…):

“J’ai levé des fonds pendant ma grossesse. Avec du recul, cette épreuve a été extrêmement bénéfique pour la société : nous avons revu toutes nos méthodes de travail afin d’avancer plus vite, plus efficacement et notre croissance n’a jamais été aussi importante.”
Au-delà du sujet que tu as traité dans un bonbon précédent (nous nous trouvons de toute évidence face à un article qui doit pousser une grosse majorité de lecteurs à se demander pourquoi eux ne sont pas capables de ce genre d’exploits), je m’étonne une fois encore des injonctions permanentes que notre société renvoie aux mères, de façon plus ou moins insidieuse. Même en pleine grossesse, on ne pourrait pas nous ficher la paix ? Non, il faut encore lever des fonds, monter des boîtes, en profiter pour devenir une artiste connue dans le monde entier, écrire un bouquin… Et puis d’abord, en quoi cette information sur la grossesse de cette dame est-elle si importante dans le fait de lever des fonds?

Vivant actuellement en parallèle les deux expériences d’élever des enfants et de développer une activité professionnelle indépendante, je trouve incroyable qu’on ne lise pas plus d’articles sur la difficulté à tout mener de front, à continuer à avoir non seulement une vie professionnelle satisfaisante avec des enfants en bas âge, mais aussi une vie de couple, une vie intérieure et créative, une vie amicale. Tu le sais, j’avais déjà vécu le fait de devenir mère comme un des plus grands hold-ups de tous les temps (j’ai très envie d’écrire un article à ce sujet, mais je crois que je n’assume pas encore complètement la radicalité de mon propos), mais la question de l’entrepreneuriat en tant que mère de jeunes enfants en tient une couche aussi.

Il serait à mon sens tellement plus intéressant et utile à tous et toutes que cette femme raconte sincèrement et avec authenticité comment elle a vécu cet événement de vie, en partageant ses doutes, en montrant sa vulnérabilité, au lieu de continuer à renforcer les codes du monde actuel du business – toujours plus loin, plus dur, plus fort…

Coup de gueule du soir, bonsoir – la guerrière féministe en moi se réveille !

Je penserai bien à toi demain matin – invitation Outlook dans mon agenda ou pas.

Grosses bises!

V/.

Quand les gens parlent autour de toi, écoute complètement

Salut F/.

Comment vas-tu en ce début de semaine chargée ? J’espère que tu tiens le coup et que toute l’énergie que tu as pu puiser ce long week-end dans ta maison à la campagne ne s’est pas envolée au moment où tu as posé le pied à Montparnasse !

De mon côté, petit moral depuis hier. J’ai tout d’abord imaginé appeler ce post « quand travailler beaucoup rend malheureux », et puis je me suis dit que finalement, mon problème du moment n’était pas là, ou en tous cas pas seulement là.

Depuis mon entrée dans la « vie active » (comme si j’avais passé ma vie allongée sur un canapé avant mes 24 ans !), je supporte mal ces périodes où je suis surchargée de travail et vis de rendu en rendu, de réunion en réunion, à la merci des demandes de clients qui, souvent, il faut bien le dire, entrent dans ce vaste champ que j’appelle « l’urgence artificielle ». Mes plus vifs souvenirs de mes débuts en cabinet d’audit en 2007 se résument à cette envie de pleurer à chaque fois que j’entendais « on fait une pause ? » à 20h ou qu’on me disait « à demain ! » le vendredi soir. La bonne nouvelle, c’est que je devrais, avec plus de 10 ans d’expérience supplémentaire et ce fameux statut d’indépendante avoir tous les moyens à ma portée pour ne plus revivre ces moments-là. La mauvaise, c’est que je n’arrive toujours pas à les accepter, voire même que les sentiments de rejet de « cette vie-là » sont de plus en plus forts.

Alors je me suis posé la question classique : es-tu sûre que ce boulot dans lequel tu mets tant d’énergie ait du sens pour toi ? qu’il en vaille la peine ? Après réflexion, ce que je me dis est beaucoup plus simple : ce qui m’importe par-dessus tout dans la vie, c’est d’avoir du temps pour ce qui compte vraiment :

Une attention sincère et véritable accordée à l’autre, une présence authentique et lucide à l’autre et à soi.

Et il se trouve que travailler beaucoup m’empêche justement de faire ça. Ma « bande passante de cerveau » rétrécit, mon attention s’étiole, la fatigue me gagne, et je passe à côté de toutes ces petites choses qui rendent le quotidien si savoureux. Je crois que je suis devenue accro à l’instant présent : le vivre pleinement, en pleine conscience et capacité de mes moyens. La question est maintenant : comment s’assurer cette qualité de vie au quotidien ? au moins un peu ?

Je te laisse avec une phrase d’Hemingway que j’aime beaucoup :

« Quand les gens parlent autour de toi, écoute complètement. Ne réfléchis pas à ce que tu vas dire. La plupart des gens n’écoutent jamais. D’ailleurs, il ne regardent pas non plus ».

Je t’embrasse,

V/.

Etre entendue dans ses silences

Salut F/,

Après une semaine bien remplie, quel plaisir que de trouver ton cadeau dans ma boîte mail… Un blog, rien qu’à nous! et que d’autres gens pourront lire! C’est excitant, et ça fait un peu peur à la fois… Dans tous les cas, je suis ravie de vivre cette aventure avec toi, et de voir où cela va nous mener.

Comme tu le sais, je suis une grande fan du podcast “La Poudre”, qui à chaque épisode me fait réfléchir sur des sujets de fond, me touche, voire m’émeut quand j’écoute tous ces parcours de femmes courageuses, engagées et tellement créatives. Le dernier à m’avoir marquée est la discussion entre Lauren Bastide et Déborah Lukumuena, l’une des actrices principales du film “Divines”. L’une des phrases qu’elle a prononcée au micro de Lauren était la suivante :

“Il y a des temps pour parler, et des temps pour se taire. J’ai beaucoup parlé, j’aimerais maintenant qu’on m’entende dans mes silences.”

J’ai ressenti quelque chose de très fort à l’écoute de cette phrase. Pour la grande bavarde et extravertie que je suis, un nouveau champ s’ouvrait à moi: ah bon? on peut être entendu dans ses silences? mais ça veut dire quoi exactement? Tout le monde sait que “la parole est d’argent, mais le silence est d’or”, mais dans tout ça, qu’est-ce que l’autre perçoit? Qu’est-ce qu’il comprend de ce silence? Comment sait-on si le silence a été bien compris? Quel lien entre silence et non verbal?

Je n’ai pour le moment aucune idée de la façon dont je vais creuser ce sujet, mais ça me donne envie d’expérimenter, et j’y vois d’ailleurs un lien avec notre dernière discussion sur le pouvoir versus le leadership. Comment un leader manie-t-il le silence pour laisser un espace de créativité à ceux qui l’entourent?

Je te fais de grosses bises et suis très heureuse de te voir demain à Paris!

V/.

Se connecter à son animalité

Hello F/,

Comment vas-tu ? Comment s’est passé ce week-end à la campagne ? J’aime beaucoup recevoir les photos de ton potager, je sais et sens tout le bien qu’il te fait et je vis donc ces sentiments par procuration !

Pour ma part, week-end sportif mais plein de belles rencontres, dont notamment une qui m’a ouvert les yeux sur une nouvelle manière de voir, et dieu sait que j’aime ces moments-là..

Nous étions en pleine discussion avec deux amis, un couple, et philosophions sur la quête de sens et la façon dont les hommes et les femmes la vivaient au cours de leur vie. Pour ma part, j’étais plutôt convaincue que la raison pour laquelle on trouvait une grande majorité de femmes dans les ateliers ou rencontres dits « de développement personnel » était toute simple : les hommes préféraient réfléchir à leur projet de vie en solitaire ! Et là, Pierre, mon ami, a fait une hypothèse intéressante : selon lui, la maternité notamment, mais le rapport général que nous, les femmes, entretenions avec notre corps, nous ramènerait davantage à notre animalité, à l’essentiel et à la vie, et nous ferait donc questionner davantage notre société contemporaine, très cérébrale et parfois déconnectée du concret.

Est-ce que finalement, l’une des solutions pour ouvrir ce champ de réflexion à l’autre ne serait-elle pas de le mettre en posture de découvrir son animalité ?

🙂

Je suis visiblement d’une humeur philosophique en ce lundi

Grosses bises !

V/.

L’entreprise du XXIè siècle sera politique ou ne sera plus

« Ce livre n’a qu’une seule ambition. Celle d’inviter le lecteur à se projeter dans un monde aux antipodes du nôtre et qui, pourtant, est déjà en train d’éclore. Un monde auquel les entreprises, assumant leur responsabilité politique, contribueraient positivement, au-delà de leur seul apport économique. Ce n’est pas un monde idéalisé, une utopie inaccessible. Je le sais, car j’ai la chance de diriger une entreprise qui en fait partie. D’ailleurs, ni ma nature ni mes fonctions ne me portent à la rêverie ou à l’idéologie. Mais mon souhait est de témoigner, et plus encore de convaincre. Témoigner, car je mesure combien une entreprise peut servir le bien commun et combien cette contribution peut nourrir sa propre performance. Convaincre, car si ce qui est bon pour l’entreprise est bon pour le monde, alors il y a urgence à généraliser ce modèle. » Pascal Demurger