Mauvaise mère ?

Bonsoir F/, J’espère que tu vas bien ce soir, et que tu as retrouvé la sérénité que tu espérais auprès de ton homme… Qu’elles sont difficiles, ces périodes où on passe notre temps à serrer les dents au boulot en attendant des jours meilleurs, alors que nous avons entre temps tant d’outils et de bonnes pratiques entre les mains pour prendre du recul et garder la tête froide!
En parlant de tête froide, j’ai envie de parler ce soir d’un sujet que j’ai déjà maintes fois abordé dans nos échanges vocaux mais qui, encore et toujours, m’énerve au plus haut point. En “scrollant” sur mon téléphone à lire des articles sur les réseaux sociaux, je tombe sur un exemple parfait de ce qui me fait bondir. Je te fais part du début (pas besoin d’aller beaucoup plus loin pour comprendre la teneur de cet article…):

“J’ai levé des fonds pendant ma grossesse. Avec du recul, cette épreuve a été extrêmement bénéfique pour la société : nous avons revu toutes nos méthodes de travail afin d’avancer plus vite, plus efficacement et notre croissance n’a jamais été aussi importante.”
Au-delà du sujet que tu as traité dans un bonbon précédent (nous nous trouvons de toute évidence face à un article qui doit pousser une grosse majorité de lecteurs à se demander pourquoi eux ne sont pas capables de ce genre d’exploits), je m’étonne une fois encore des injonctions permanentes que notre société renvoie aux mères, de façon plus ou moins insidieuse. Même en pleine grossesse, on ne pourrait pas nous ficher la paix ? Non, il faut encore lever des fonds, monter des boîtes, en profiter pour devenir une artiste connue dans le monde entier, écrire un bouquin… Et puis d’abord, en quoi cette information sur la grossesse de cette dame est-elle si importante dans le fait de lever des fonds?

Vivant actuellement en parallèle les deux expériences d’élever des enfants et de développer une activité professionnelle indépendante, je trouve incroyable qu’on ne lise pas plus d’articles sur la difficulté à tout mener de front, à continuer à avoir non seulement une vie professionnelle satisfaisante avec des enfants en bas âge, mais aussi une vie de couple, une vie intérieure et créative, une vie amicale. Tu le sais, j’avais déjà vécu le fait de devenir mère comme un des plus grands hold-ups de tous les temps (j’ai très envie d’écrire un article à ce sujet, mais je crois que je n’assume pas encore complètement la radicalité de mon propos), mais la question de l’entrepreneuriat en tant que mère de jeunes enfants en tient une couche aussi.

Il serait à mon sens tellement plus intéressant et utile à tous et toutes que cette femme raconte sincèrement et avec authenticité comment elle a vécu cet événement de vie, en partageant ses doutes, en montrant sa vulnérabilité, au lieu de continuer à renforcer les codes du monde actuel du business – toujours plus loin, plus dur, plus fort…

Coup de gueule du soir, bonsoir – la guerrière féministe en moi se réveille !

Je penserai bien à toi demain matin – invitation Outlook dans mon agenda ou pas.

Grosses bises!

V/.

One thought on “Mauvaise mère ?”

  1. Bonsoir V/ !

    J’ai résisté à lire ton message jusque là, car je voulais le lire à un moment où je pourrais répondre : j’adore lire,sentir, et te répondre sur cette lancée !

    Primo : merci, parce que je trouve ça vraiment chouette que tu m’entretiennes sur des questions de maternité. Je me rends compte en te lisant que beaucoup (pas par mauvais intention, peut être juste par réflexe ou manque d’attention) ne considèrent pas que je peux échanger là dessus. Car je n’ai pas d’enfants moi-même. Et je dis bien “échanger” pas “comprendre”, je comprends que là dessus je suis plus limitée.
    Une autre petite tyrannie ordinaire liée à la maternité, en l’occurrence inversée tu vois!

    J’ai bien compris ton coup de gueule, mais j’ai été très étonnée de lire que personne ne parlait de la difficulté d’être mère. On peut dire “mère+” parce que je lis dans ton message que non seulement t’es condamnée à vivre ça juste bien (au pire), être transcendée (si t’es normale), mais aussi à faire d’autre choses extraordinaires (en plus). Bref, moi j’avais l’impression qu’on en parlait beaucoup, alors j’ai tapé sur Google “de la difficulté d’être mère et entrepreneure” pour voir…

    Coup de gueule validé sur le premier résultat 🙂
    “Maman et entrepreneure : c’est possible !”, sur un site qui s’appelle forcément les-supers-mamans.
    Variante :
    “Pour cette mère de trois enfants, il est souvent compliqué d’allier vie professionnelle et familiale. « Ça n’aurait pas été possible si mon mari ne m’avait pas soutenue »” donc quand c’est compliqué, c’est possible avec ton mari parfait.

    J’ai quand même appris qu’il y a une spécialité récente (1987), la maternologie, qui parle des aspect psychiques de la parentalité de façon très intéressante en décrivant bien qu’ “on s’attend à des comportements maternels conformes à des impératifs sociaux et moraux. On se doit d’être une « bonne mère.” alors que en vrai…

    Par contre je n’ai pas trouvé du tout dans les premiers résultats de recherche le livre de Elisabeth Badinter que j’avais beaucoup aimé à l’époque où je me documentais pour répondre à “pourquoi pour moi ça n’est pas une évidence de vouloir faire un enfant?” (NB : pourtant on m’en avait donné des réponses non sollicitées : parce que tu te mens, tu ne veux pas te l’avouer, tu n’es pas connectée, tu es égoïste, tu es immature, tu ne sais pas (encore) ce qui est bon pour toi, tu n’a pas trouvé le bon, tu ne peux pas et tu ne veux pas le dire…).
    Son titre c’est Le conflit : la femme et la mère, et je te laisse avec un extrait :

    “La barque de la maternité est aujourd’hui chargée de trop d’attentes, de contraintes, d’obligations. Il y a péril tant pour la femme et le couple que pour le lien social”

    Entre (nos) deux coups de gueule : écris ton article, tu verras bien ensuite si L’Upside Down est le bon candidat pour le recevoir, ou pas !

    Je t’embrasse !

    F/.

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