Salut V/ !
Je te retrouve sur ce canal après une longue absence. J’ai délaissé mon ordinateur parce que je saturais de mon ordinateur. Autant je vis bien le confinement, autant la connexion permanente “de tout le monde à tout” commence à me peser. Ca n’est pas tant le fait bosser en télétravail, ce que je fais souvent, mais le fait que tout le monde n’ait que le téléphone et l’ordinateur pour communiquer. Cela sature ma bande passante numérique.
Je suis dans mon premier jour de vacances confinées, et je tente une déconnexion professionnelle totale. Ce matin dans ces conditions, j’ai pris conscience que le foisonnement actuel su la prospective de “l’après COVID19” ne m’intéresse plus du tout. J’ai l’impression d’avoir été noyée sous les articles, prises de parole et autres essais, reçus transférés et trouvés. Chacun y va de “celui-ci est vraiment mieux”, “celui-là est le meilleur que j’aie lu” (y compris moi), typiquement les phrases qu’on est obligés de mettre en épithète pour faire émerger de la masse quelque chose. Oui c’est cette “masse” qui me fatiguais ces derniers temps. Là où d’habitude on te donne un article parce que tu t’intéresse à un sujet, ou le sujet en lui même suffit pour te donner envie de lire car il t’interpelle et n’est pas traité par n’importe qui, en ce moment tout le monde traite du même sujet avec un angle différent. Et tout le monde a et donne son avis, comme si tous les avis se valaient, avec pas forcément de données ou d’expériences qui apportent quelque chose. Je ne sais pas comment va être appelé ce syndrome là, il va forcément avoir un nom s’il n’en a déjà un, mais je souffre de covidoprospective saturation ! Un peu la même sensation que quand je me risque sur Linkedin, après un moment d’intérêt je ressors avec “Un goût de rien…”.
Je suis aussi fatiguée de l’excitation ambiante, je ressens certes une saturation de l’espace de parole et de discussion comme je le disais précédemment, mais aussi une façon de traiter les choses de toutes parts qui est paradoxale : tout est à l’arrêt, on parle de ralentir, et l’on maintien une forme de tension artificielle et de débauche d’énergie, là où une canalisation serait plus vertueuse. (Je ne parle pas évidemment des personnels de santé et secours…).
Bref, je sais bien qu’occuper le terrain est un réflexe bien normal pour combler le vide, mais un peu de vide sain dans l’espace de parole public, professionnel, digital en général ne me ferait pas de mal. Et je m’en vais donc me faire l’équivalent d’une semaine sans lecture, mais uniquement sans lecture “digitale” et garder mes romans, et messages amicaux et familiaux. Exit mails, newsletters et channels d’actualité ! Bonjour travaux physiques et manuels.
Je t’embrasse, merci de faire partie de ce qui reste 😉
F/.
Salut F/ !
Je te réponds en ce samedi matin où je suis tombée du lit avant 6 heures – ça fait bien longtemps que ça ne m’étais pas arrivée. Preuve là aussi, sûrement, de la saturation de mon esprit qui n’arrive plus à se poser en cette période si étrange, ou en tout cas, pas assez pour me permettre de dormir profondément de manière régulière!
J’ai été partagée à la lecture de ton bonbon, et notamment de son titre. D’un côté, je ne peux qu’être d’accord avec toi : trop d’articles, trop de sollicitations, trop d’avis qui viennent effectivement saturer l’espace, mon espace de manière évidente. L’angoisse de louper quelque chose, de ne pas être au courant, de ne pas réussir à avoir d’avis, certainement. Et avoir un avis, en ce moment, n’est pas chose aisée! J’écoutais hier une économiste parler sur La Poudre, podcast que j’aime toujours beaucoup, dire qu’elle avait décidé, dès le début de la crise sanitaire, de ne pas co-signer de tribunes ou de s’exprimer sur la crise et ses impacts avant que celle-ci soit derrière nous, à l’exception des sujets urgents, tels que le fait de légaliser les sans papiers pour qu’ils puissent profiter d’une protection. J’ai trouvé ça sage et intelligent, et me suis bien entendu interrogée sur mes propres comportements depuis la mi-mars.
A l’inverse, je n’ai pas pu m’empêcher de réagir au “pour rien” du titre que tu as donné à ton bonbon. Certes, j’ai reçu beaucoup d’articles et de contenu, dont une grande partie a semé le trouble plus qu’autre chose. Pour autant, certains d’entre eux m’ont donné un éclairage différent, qui m’a aidée à regarder les choses avec un nouvel angle, et je ne peux pas nier que ça m’aide aussi beaucoup à m’y retrouver dans ce brouhaha permanent. A sortir aussi de notre petite bulle de privilégiés par les temps qui courent, et à comprendre la réalité d’autres personnes. Il faudrait disposer d’un oeil laser pour pouvoir, avant de plonger dans un contenu, savoir s’il va nous être utile ou pas!
Pas évident de trouver de la sérénité, malgré la méditation, l’écriture et le sport. J’ai l’impression d’être une équilibriste sur un muret entre le “je coupe tout pour me protéger” et “je m’informe pour comprendre et me faire un avis”…
J’espère que ta semaine de vacances s’est passée comme tu voulais, et que justement, tu en ressors plus sereine. Le moulin ayant cet effet magique, je garde un espoir pour toi!
Bises et à bientôt j’espère,
V/